Êtes-vous prêt à souffrir ?

(Un texte de Michel Landry)

À plusieurs égards, le monde du sport nous inspire de bien des façons. L Tech Solution publie une série de billets qui font le pont entre les considérations sportives et organisationnelles.

Allons-y cette fois avec un sujet peu orthodoxe et disons-le, pas très fashion, mais qui comporte certaines similitudes entre ces deux mondes.

1/3 – Souffrir… pourquoi ?

Voilà un terme devenu tabou dans notre société d’aujourd’hui. Pourquoi devrions-nous souffrir aujourd’hui pour obtenir quelque chose?  L’accès à toutes les formes de technologie nous permettant d’accéder à nos requêtes de la façon la plus facile qui soit a pour effet de chasser tranquillement ce mot du vocabulaire moderne.

Il fut un temps ou ‘travailler fort’ était noble, aujourd’hui il y a là une connotation plutôt négative (mal organisé, mauvaise gestion de temps). De nos jours, il faut dire ‘travailler intelligemment’, ce qui est, bien sûr, très pertinent, mais pourquoi mettre ces deux termes en opposition? Sont-ils si incompatibles ?

Pourquoi n’entend-on jamais ‘travailler fort et intelligemment’?  Einstein était-il bête de travailler 18 heures par jour?  Lors d’une entrevue, l’un des co-fondateurs du Cirque du Soleil mentionnait le fait qu’à leurs débuts, ses collègues et lui se relayaient pour passer une nuit blanche de travail par semaine afin d’accomplir le boulot.

Haile Gebrselassie, possiblement le plus grand coureur de fond de l’histoire, disait ceci : « Trois choses sont essentielles à la réussite : la discipline, le dur travail et avant tout, l’engagement! »

L’engagement ! Voilà le terme, mais quelle est la limite à l’engagement?    

 

2/3 – Le talent et le seuil de tolérance

Dans le monde du sport, l’une des premières choses que l’entraîneur tentera de bien mesurer est, l’amour que l’athlète porte pour son sport! Plus l’athlète aime son sport, plus il sera prêt à faire les sacrifices nécessaires, peu importe son niveau de compétence.

Le rugbyman britannique, Charlie Stone : « Je vois que vous êtes en sang; j’imagine pourtant que vous n’hésiteriez pas à me bousculer … et ça m’inquiète. »

Extrait du livre : Le mental pour gagner, Éditions Robert Lafond.

Si l’entraîneur mesure bien cet ‘indicateur’, il pourra ainsi pousser l’athlète à cette limite et ainsi obtenir le meilleur de lui. À l’opposé, il devient inutile de fournir toute une panoplie d’outils et de méthodes à l’athlète pour qu’il puisse mieux performer, si ce dernier n’est pas prêt à… souffrir un peu plus!

C’est ainsi qu’un bon entraineur cherchera toujours, par la motivation, à augmenter le niveau d’amour du sport de son athlète, pour ensuite pouvoir le pousser à cette nouvelle limite, et ainsi de suite.

Il est dit qu’aux Jeux Olympiques, ce ne sont pas les plus talentueux qui y parviennent, ce sont ceux qui n’ont pas arrêté!  Tout entraineur vous dira avoir vu passer des talents inouïs sous leur gouverne, mais que ceux-ci n’était pas prêt à fournir l’effort … et à avoir mal!

À ce titre, Gabriela Andersen-Schiess a marqué l’histoire du sport par son abnégation.

Cette marathonienne suisse compléta son dernier tour de piste, lors du premier marathon féminin de l’histoire des Jeux Olympiques (Los Angeles 1984) en titubant d’une façon telle que la planète arrêta de respirer devant ce spectacle insoutenable à regarder. Plus de six minutes pour compléter ce dernier tour…

Quand Gabriela Andersen-Schiess évoque 30 ans plus tard ce qu’elle appelle ironiquement « l’œuvre de sa vie », c’est un mélange de terreur et de panique qui s’empare de son regard. « Jamais je n’avais autant souffert. » Jamais, surtout, l’esthétique sportive n’avait été poussée à un tel paroxysme de souffrance.

Elle dira simplement qu’il n’était pas question d’abandonner au premier marathon féminin de l’histoire des Jeux!

Elle est devenue une icône mondiale, au point où elle trouva injuste une telle renommée après avoir terminé en … 37e position!

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3/3 – Assister et supporter …

La mode est aux outils, aux méthodes, aux recettes, aux listes proposant 10 façons de ….

Il est facile de proposer des listes, par exemple, pour courir plus vite, il faut ;  -lever le genou bien haut,   -allonger la jambe le plus loin devant,  -synchroniser les bras pour tirer le haut du corps … etc.

Ce qu’il n’est pas dit dans ces listes, c’est ‘répéter cette séquence un, deux, dix millions de fois’!!

Le propos ici n’est certainement pas de repousser les limites de façon déraisonnable.

Mais tous les intervenants internes et externes désireux de bien supporter et d’assister les dirigeants et gestionnaires d’entreprises dans l’atteinte de leurs objectifs devraient d’abord mesurer ce fameux indicateur qu’est ‘l’amour pour son sport’, (sous-entendu projet, entreprise, objectif, volonté … ), et travailler de pair afin d’augmenter sans cesse ce seuil.

De cette façon, vous, les dirigeants, gestionnaires ou tous professionnels, vous deviendrez de féroces compétiteurs, au sens fair-play du terme, et vous serez de ceux qui n’arrêtent pas!

Soyez de ceux qui n’arrêtent pas!

Michel Landry

L.Tech Solution